FRE 2099H-S

Roman et document dans l'extrême contemporain

Horaire

Mercredi 13h - 15h

Instructeur:

P. Michelucci

Endroit:

Odette Hall

Salle:

OH 213

Description:

La question du savoir de la littérature (Dumoulié, Engel) se pose dans la période contemporaine, ère dite « de l'information », en des termes différents de la capacité d'éducation morale humaniste dont on a longtemps investi la littérature (Badiou, Bouveresse). Dans une contemporanéité échafaudée sur l'effondrement des savoirs modernes (Lyotard), de nombreuses variantes du roman contemporain sont portées par le public et la critique qui interrogent l'intégration des modalités du connaissance dans le monde de la fiction. Les romans métahistoriques (Mertz-Baumgartner) construisent leur trame sur le rappel et la consignation des faits, mais dans un but de creusement des zones obscures et de mise en question des processus de la fabrication et d'archivation de l'Histoire. Cependant, dans le genre florissant de l'exofiction contemporaine, les « vies minuscules » côtoient les suppléments biographiques et les marges de biographés célèbres, laissant entrevoir un désir de révision ou de révélation des contre-exemples et des oublié.e.s. Enfin, les narrations littéraires documentaires jouent sur la fonction d'attestation et la remise en cause de documents divers travaillés par la narration ou le dispositif textuel, alors que, dans le même temps, le terme de « wikinovel » émerge (Vilain). Au lieu d'une interaction autrefois fructueuse dans sa réussite éducative entre le travail de l'œuvre et la matière mise à disposition par les sciences (Marot, Pierssens), le roman contemporain (Blanckeman, Marx) active plutôt le trouble critique devant l'archive (Prstojevic). On relèvera ainsi la dramatisation de la quête d'information qui fonde le roman d'enquête (Demanze) et le roman sur le fait divers, autres illustrations contemporaines florissantes. À partir d'un corpus choisi visant à illustrer les genres contemporains qui insèrent le document dans le roman, tout en questionnant leurs rapports et en posant des interrogations nouvelles sur la capacité de la littérature à faire connaître, ce séminaire vise à balayer un large éventail de modalités contemporaines d'inscription des figures de la connaissance.

Textes au programme

Anne & Claire BEREST. Gabriële, Paris, Livre de poche, 2018.

Yannick HAENEL. Jan Karski, Paris, Gallimard, coll. Folio, 2009 [2012].

Emmanuelle PIREYRE, Comment faire disparaître la terre ?, Paris, Seuil, coll. Fiction et Cie, 2006.

Laurent BINET. HHhH, Paris, Livre de poche, 2015.

Ivan JABLONKA. Laëtitia ou la fin des hommes, Paris, Seuil, coll. Points, 2016.

Bibliographie sélective

BADIOU, Alain. Petit manuel d'inesthétique, Paris, Seuil, coll. L'ordre philosophique, 1998.

BLANCKEMAN, Bruno. « Une approche située du roman français (des plis et des paillettes) », dans Écriture et identités dans la nouvelle fiction romanesque, dir. Rita Olivieri-Godet, Rennes, PUR, 2010, p. 19-29.

BOUSSET, Hugo. « Le roman est un oignon », dans Littérature et savoir(s), dir. Sophie Klimis & Laurent Van Eynde, Bruxelles, PUSL, 2002, , p. 211-222.

BOUVERESSE, Jacques. La connaissance de l'écrivain. Sur la littérature, la vérité et la vie, Paris, Agone, 2008.

DEMANZE, Laurent. Un nouvel âge de l'enquête, Paris, Corti, coll. Les essais, 2019.

DUMOULIÉ, Camille. Littérature et philosophie. Le gai savoir de la littérature, Paris, Armand Colin, 2002.

ENGEL, Pascal. « Trois conceptions de la connaissance littéraire : cognitive, affective, pratique », Philosophiques, vol. 40, nº 1 (printemps 2013), p. 121-138.

LYOTARD, Jean-François. La condition postmoderne. Rapport sur le savoir, Paris, Minuit, 1979.

MACHEREY, Pierre. À quoi pense la littérature ?, Paris, PUF, 1990.

MAROT, Patrick (dir.). L’inscription littéraire des savoirs, Paris, Classiques Garnier, 2019.

MARX, William. La haine de la littérature, Paris, Minuit, 2015.

MERTZ-BAUMGARTNER, Birgit. « Le roman métahistorique en France », dans Un retour des normes romanesques dans la littérature française contemporaine, dir. Wolfgang Asholt & Marc Dambre, Paris, Presses de la Sorbonne nouvelle, 2010, p. 123–131. En ligne à < https://books.openedition.org/psn/2080?lang=en >.

PIERSSENS, Michel. Savoirs à l'œuvre. Essais d'épistémocritique, Lille, Septentrion, 1991.

PIREYRE, Emmanuelle. « Fictions documentaires », dans Devenirs du roman, Paris, Inculte/Naïve, 2007, p. 119-137.

PRSTOJEVIC, Alexandre. Le témoin et la bibliothèque. Comment la Shoah est devenue un sujet romanesque, Nantes, Defaut, 2012.

RUFFEL, Lionel. « Un réalisme contemporain : les narrations documentaires », Littérature, vol. 166, nº 2 (2012), p. 13-25.

VIART, Dominique. « Nouveaux modèles de représentation de l'Histoire en littérature contemporaine », Revue des lettres modernes, nº 10, série « Écritures contemporaines » (2009, « Nouvelles écritures littéraires de l'Histoire »), p. 11-39.

« Les littératures de terrain », Revue critique de fixxion française contemporaine, nº 18 (juin 2019, « Littératures de terrain », dir. Alison James & Dominique Viart), p. 1-13. En ligne à < http://www.revue-critique-de-fixxion-francaise-contemporaine.org/rcffc/article/view/fx18.20/1339 >.

VILAIN, Philippe. La littérature sans idéal, Paris, Grasset, 2016.

La passion d'Orphée, Paris, Grasset, 2020.

Travaux requis :

Un exposé oral (15 minutes + débat/questions; 30%). Un rapport de lecture sur un des textes théoriques/polémiques du programme (environ 1200 mots; 20%). Un travail écrit (environ 4000 mots; 40%). Participation (10%).